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Le Paradis Perdu

A la recherche du paradis perdu ? La non-acceptation du malheur et l’illusion du bonheur permanent

Lorsque je rencontre mes clients ou d’autres personnes, je constate très souvent qu’ils désirent, d’une certaine manière, arrêter le temps et que la situation de bonheur qu’ils viennent de connaître, s’éternise. Au contraire lorsqu’ils vivent des situations difficiles, ils espèrent que cela passe vite et un retour à une situation heureuse.

Or le processus de la vie est cyclique, une génération vient après une autre, des saisons changent et reviennent ; et le processus est aussi paradoxal, un état ne se définit que face à son contraire, la vie est déterminée par rapport à la mort, le jour par rapport à la nuit, l’ombre par rapport à la lumière. Il est donc naturel et dans l’ordre du monde que notre sensation d’être plus ou moins heureux fluctue et que les moments heureux se définissent par rapport aux moments malheureux.

C’est ainsi, les conditions du bonheur ne sont pas permanentes.

Mais d’où vient cette illusion que l’on pourrait figer un état qui nous satisfait ?

Les hommes de tout temps ont eu peur de l’incertitude, des forces naturelles qui les frappaient au hasard et ont cherché un sens à un monde qui leur semblait hostile et absurde. Ils ont collectivement fait naître des mythes et des religions qui donnaient un sens à ce qui les dépassait.

L’Occident croit au Paradis

Les civilisations nées autour du berceau méditerranéen, influencées par les religions du Livre, voient le monde comme un combat entre le Bien et le Mal avec comme récompense le Paradis, état permanent de bien-être. De même les civilisations dites barbares du nord de l’Europe avaient leur Paradis qui accueillait les guerriers valeureux.

Notre culture occidentale porte dans son ADN cette vision du monde basée sur le combat du bien et du mal. Et quelque soit nos convictions philosophiques ou religieuses, notre éducation a mis en place des schémas internes automatiques, associant pensées et émotions, qui nous conditionnent à réagir selon ce paradigme culturel. Notre réalité peut bien nous démontrer le contraire, nous refusons de la voir et gardons nos illusions.

L’Orient croit à l’Harmonie

Au contraire les civilisations orientales donnent un schéma du monde fondé sur un nécessaire équilibre entre deux principes opposés et complémentaires, et le but est l’harmonie intérieure sans lutte entre ces deux principes. Leur recherche n’est pas d’entrer au paradis mais d’être en accord avec l’harmonie du monde.

Nous avons souvent du mal à les comprendre, car ils ne jugent pas en bien ou mal mais en maintien de l’équilibre ou rupture de l’équilibre, en respect ou transgression des règles. Il n’y a pas de Paradis, mais un long chemin vers l’Harmonie intérieure.

Et la vie dans tout cela !

Nous, occidentaux, devrions comprendre que notre point de vue ne donne qu’un aspect de la réalité du monde. Nous sommes axés sur la hiérarchisation des valeurs et escamotons une autre réalité qui est celle que la vie nait de forces et principes opposés et complémentaires.

Acceptons que le bien et le mal soient indissociables et se définissent mutuellement. Prenons un angle plus intéressant : celui de s’interroger sur le maintien de l’équilibre de la vie.

Le bonheur ne se vit pas au présent

Quand nous regardons de plus près, c’est rarement sur le moment que nous prenons conscience de notre bonheur, mais à partir de l’instant où la situation se dégrade, nous comprenons que ce moment passé avait été heureux. Nous en goûtons alors le regret.

Ou bien dans une situation qui ne nous convient pas nous rêvons et espérons une situation idyllique qui nous comble. Nous en goûtons alors l’attente.

Le bonheur ne se conjugue pas au présent mais au passé et au futur.

Quelles sont les conséquences dans l’entreprise ?

Tout d’abord les relations sociales s’en trouvent modifiées car chacun tend à idéaliser une situation passée ou projetée qu’il cherche à retrouver ou à obtenir, l’empêchant de se centrer sur l’obtention d’un nouvel équilibre satisfaisant. Lorsqu’une perturbation provoque la nécessité d’un changement, que ce soit une fusion, un changement de direction, une réorganisation, l’arrêt d’un produit phare, la diminution du chiffre d’affaires ou de la rentabilité, les membres de l’entreprise prennent conscience que le passé était heureux et qu’ils sont en train de le perdre. La direction de son côté tend à idéaliser la situation future. De là vient la difficulté de se confronter au présent et d’élaborer une adaptation qui permet à l’entreprise comme à son personnel d’effectuer des choix satisfaisants.

Cela éclaire aussi les difficultés de prise en compte des cycles économiques dans les entreprises et la tendance au toujours plus, déconnectée de la réalité des marchés et des capacités des collaborateurs. En effet la plus part des entreprises fixent imperturbablement des objectifs d’augmentation comme si les arbres montaient jusqu’au ciel. L’anticipation de crise ou du seuil de saturation est rarement prise en compte et la stratégie est plutôt axée sur l’amélioration du rendement que sur l’élargissement de l’offre et du « territoire ».

Enfin, ceci entraine une tendance à rechercher des solutions idéales qui règleraient définitivement les problèmes quand la crise est là, plutôt qu’entrer dans un processus d’amélioration permanente quotidien sachant que le travail d’adaptation ne sera jamais fini. Le résultat est le maintien d’un statu quo insatisfaisant avec une promesse d’amélioration radicale qui lorsqu’elle est mise en place est très souvent décevante. Pendant tout ce temps perdu, il était possible d’améliorer à petit pas la situation, et de faire travailler chacun sur un futur immédiat plus satisfaisant que ce qui vient d’être vécu.

Refuser l’illusion de la permanence du bonheur

Nous nous comportons comme si nous étions à la recherche d’un paradis perdu au lieu de vivre pleinement notre vie à chaque instant.

Il nous serait utile d’apprendre à refuser l’illusion du bonheur permanent et comprendre que nous avons toujours le pouvoir de choisir notre réponse émotionnelle face à ce qui nous arrive, et de simplement trouver, dans l’acceptation des évènements, le bonheur d’être vivant.

Pour commencer à changer, nous aurions bénéfice à comprendre que vivre s’est s’adapter en permanence pour trouver le meilleur équilibre à chaque instant.

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